Communication

Le job de nos rêves ou celui pour lequel on a été formé ? par Sakina Traoré

Sakina Traoré est assistante concepteur-rédacteur* chez Voodoo Group. Elle a étudié le marketing et la finance à l’ESCA-INPHB, l’Ecole Supérieure de Commerce d’Abidjan, qui fait partie de l’Institut National Polytechnique Houphouët Boigny. Passionnée par l’écriture et l’éducation, elle est co-auteure de SuperWomen, un recueil de témoignages qui donne la parole à douze jeunes femmes africaines qui ont osé l’’entrepreneuriat et a organisé le TEDx Yamoussoukro en 2016. 

Bonjour à tous !

C’est le premier article que je partage sur la plateforme et je suis heureuse de commencer cette aventure avec vous. J’espère qu’on fera un long chemin ensemble, et que mes mots répondront à certaines de vos interrogations autant qu’ils m’aideront moi-même à avancer.

Alors, je m’appelle Sakina, j’ai la vingtaine et je travaille depuis dix mois maintenant comme assistante concepteur-rédacteur dans une des plus grandes agences de communication de mon pays. Je ne suis pas encore diplômée parce que je n’ai pas encore soutenu mais on aura le temps d’aborder ce sujet plus tard. Pour ce premier contact, j’ai décidé de vous raconter pourquoi j’en suis arrivée à exercer un métier que je ne connaissais pas du tout et donc, pour lequel je n’ai reçu aucune formation. Si si, c’est possible ! Vous allez voir comment.

I. Trouver sa voie en dépit des voix contraires

Quand j’étais au lycée, je voulais devenir avocate. Deux choses m’attiraient vraiment dans ce métier :

  1. les avocats avaient l’air d’être des gens très occupés. Pour moi qui ai passé toute mon enfance et mon adolescence à m’ennuyer à la maison, c’était une perspective alléchante que de pouvoir avoir des journées bien remplies ;
  2. je voulais aider des gens. Ça m’a toujours remplie de fierté et de bonheur de savoir que j’avais contribué à redonner le sourire à une personne en difficulté. En tant qu’avocate, je prévoyais de me spécialiser dans la défense des femmes victimes de violences conjugales et des enfants maltraités.

Évidemment, rien ne s’est passé comme prévu. Une fois mon bac en poche, j’ai voulu faire du droit humanitaire mais quand je l’ai annoncé à mon père, il m’a simplement dit : « il n’y a pas d’argent dedans », et la discussion fut close. Je n’ai pas beaucoup bataillé pour le convaincre à l’époque. Quand j’y pense, j’ai une pointe de regret parce que je me dis qu’en ce moment même, je pourrais être en train de faire une différence dans la vie de quelqu’un d’autre. Ce que j’en ai tiré ?

j’ai compris que lorsqu’on est sûr d’avoir trouvé le job que l’on aimera pratiquer chaque jour de sa vie, on ne doit pas se laisser influencer, par personne. Au risque de passer à côté de quelque chose. Il faut se battre pour réaliser ses rêves, que l’on ait 16 ou 77 ans.

C’est ce que j’ai fini par faire plus tard. Mais revenons à mon récit. En 2012 donc, j’ai abandonné l’idée de devenir un jour avocate. À ce stade, j’avais deux options : aller au Maroc ou rester dans mon pays pour étudier le marketing et/ou la finance. Pour des raisons personnelles, j’ai choisi de rester. Et quatre ans plus tard, je suis ressortie d’une école de commerce où j’avais appris un tas de trucs que je n’avais pas hâte de mettre en pratique.

C’est bizarre mais jusqu’à ma dernière année sur les bancs, je n’avais pas réalisé à quel point je redoutais de travailler dans le domaine pour lequel j’avais étudié. J’avais très vite abandonné l’idée de faire de la finance ou de la comptabilité parce que moi et les chiffres, ça fait cinq. Moi et les procédures figées ? Ça fait vingt.

Il ne me restait donc plus d’autre alternative que le marketing bien qu’en réalité, j’avais été formée pour des métiers comme Chef de Produit, Responsable des ventes, etc. Rien qui m’emballe, rien qui titille ma créativité qui, à ce stade de ma vie, était désireuse de s’épanouir. J’étais convaincue que je serais malheureuse comme les pierres si je m’obstinais à emprunter des chemins qui ne m’enchantaient pas.

Alors j’ai décidé de ne pas faire le job pour lequel j’avais été formée mais plutôt celui que je serais heureuse d’exercer, le job de mes rêves.

Je me suis tournée vers la communication, la publicité. Bien que je ne sois pas commerciale (ce qui entre un peu dans le cadre de ma formation). Comme je vous l’ai dit plus tôt, je suis concepteur-rédacteur, ce qui requiert normalement une formation en communication/publicité (que 90% de mes collègues ont suivi).

II. Persévérer et se lancer en faisant valoir ses atouts

J’ai eu la chance de pouvoir compter sur l’aide de gens que je connaissais et qui avait l’esprit assez ouvert pour me donner l’occasion de faire mes preuves. Je pense que certaines choses ont contribué à ce que j’exerce aujourd’hui un métier qui me plaît, je vais les partager avec vous :

1/ Une fois que j’ai décidé ce que je voulais faire, je n’ai rien accepté d’autre. Même pour l’argent

J’avais d’autres opportunités pour le stage que je cherchais activement : chez Total pour un programme de jeunes diplômés (qui était mieux payé), chez L’Oréal où on m’attendait à un entretien pour lequel j’avais toutes mes chances (opportunité que j’ai offerte à quelqu’un d’autre, ce poste était également bien rémunéré) et deux ou trois autres possibilités sur la table.  Mais je voulais être concepteur-rédacteur. Rien d’autre.

Je vous avoue que rejeter toutes ces opportunités a créé quelques remous entre ma mère et moi. Elle ne comprenait pas pourquoi je le faisais mais avec beaucoup de diplomatie, j’ai réussi à la ranger de mon côté. Mon père  m’a soutenu par contre, contre toute attente. Il m’a dit : « tu es encore jeune, choisis un métier qui te plaît, l’argent viendra après ». Et c’est ce que j’ai fait.

2/ J’ai accepté tous les sacrifices qu’il fallait faire pour avoir le job de mes rêves

Dans ma promotion, la majorité de mes amis de classe sont en cabinet d’audit. Certains étaient déjà sous contrat avant la fin de notre cursus. En clair, ils étaient tous payés minimum deux fois ce que j’allais gagner en tant que stagiaire concepteur-rédacteur en agence de pub.

Heureusement pour moi, j’ai non seulement été prévenue de ce qui m’attendait si je me lançais, mais j’ai aussi reçu d’excellents conseils de la part de gens qui avaient une réelle expérience de la vie professionnelle. Alors j’ai serré le cœur et j’ai accepté tous les sacrifices qui venaient avec mon job. Les mois sans divertissement parce que je n’avais pas assez de sous, les mois sans pouvoir m’occuper de mes cheveux parce que c’était trop cher (entretenir des locks ça me coûtait la peau des fesses), des mois sans les petits luxes quotidiens (taxis compteur, restaurants…) par exemple.

3/ J’ai montré que j’avais des prédispositions naturelles pour faire ce métier, qui compensaient largement le manque de formation

J’ignore si ce point pourra s’appliquer à tous les cas de figure, mais j’ai eu la chance de pouvoir me servir de mon talent pour l’écriture et de ma créativité comme preuves que je pouvais être une bonne CR. En effet, j’ai exercé comme responsable marketing chez Kusoma Group (une startup) durant une partie de mon cursus, j’ai ainsi pu en apprendre beaucoup sur la stratégie de lancement et la promotion des produits littéraires ; j’ai également eu le bonheur d’organiser un événement aux côtés d’une équipe dynamique ; enfin, j’ai participé à l’écriture de deux ouvrages (deux recueils de nouvelles) et ai tenu des blogs. Je pouvais donc donner des exemples concrets au cours desquels j’avais utilisé les compétences dont je me prévalais.

Ces expériences, acquises du fait de mes passions, ont constitué des preuves tangibles des qualités écrites sur mon CV. Si un projet extrascolaire ou une passion vous permet d’appliquer des connaissances théoriques ou d’acquérir des compétences additionnelles, je ne peux que vous encourager à l’inscrire sur votre curriculum vitae, cela vous fera gagner des points auprès d’un futur employeur si elles s’inscrivent dans les prérequis du poste auquel vous prétendez. Savoir rédiger et être créatif par exemple, sont deux qualités qui constituent une part majeure de ce qu’il faut pour exercer le métier d’assistant concepteur-rédacteur, cela a rendu ma candidature pertinente en compensant sa faiblesse (le manque de formation dans le domaine). Tout en montrant ma capacité d’apprentissage et d’adaptation. C’est la seconde leçon que j’ai tirée de cette expérience :

quand on a un talent, un don ou même une expérience extrascolaire qui peut nous aider à nous vendre pour le job de nos rêves, oser tabler dessus dans notre candidature peut se révéler payant ! 

En définitive, ce que j’ai retenu de cette aventure est ceci :

si on a été formé pour le job de nos rêves, c’est super ! Si ce n’est pas le cas, ce n’est pas la peine de se torturer en regrettant nos choix passés. On peut encore mettre toutes les chances de notre côté pour y arriver. Ma jeunesse a été un avantage, j’ai pu faire des recherches, me former toute seule via Internet, apprendre et finalement, ça a marché !

J’espère que ce partage d’expérience vous a été utile. Je vous remercie de m’avoir lu et je vous donne rendez-vous au prochain article !

 

Sakina Traoré, @Sakina_Traore


*L’assistant concepteur-rédacteur est un professionnel qui travaille à la convergence de différents domaines : le marketing, la publicité, la communication (print et digitale), ainsi que la rédaction web. « Il exerce le plus souvent au sein du département création d’une agence de communication/publicité. (…) Il assiste le concepteur-rédacteur dans (l’élaboration) des projets et des concepts de communication innovants et (dans) la stratégie de storytelling pour la marque, les produits ou la gamme de produits (des clients). (…) (Qu’il s’agisse d’une) campagne publicitaire ou de communication, il rédige des contenus percutants aux formules choc pour différents supports. » – CFA IGS


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3 Comments on Le job de nos rêves ou celui pour lequel on a été formé ? par Sakina Traoré

  1. Goodddd. OSEZ OSEZ OSEZ

    J’aime

  2. Merci pour ce partage d’expérience. J’ai eu l’impression de me lire.
    Bonne chance pour la suite.

    Aimé par 1 personne

  3. KOUASSI Koua Jean Joel // 18 avril 2018 à 11 h 33 min // Réponse

    Excellent,
    😄😄 J’ai l’impression de me retrouver exactement à la même place. Dans mon cas par contre, il me reste encore du chemin à parcourir.

    Merci beaucoup, 😉 c’est toujours un plaisir de te lire

    Aimé par 2 personnes

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