Communication

La voie entrepreneuriale

Christian Ngan est un entrepreneur camerounais. Il est à la tête du Madlyn Cazalis Group, une entreprise de cosmétique biologique basée en Afrique Centrale. Cette dernière conçoit, fabrique, et achemine des produits de beauté naturels. Elle bénéficie d’un réseau de plus de 60 distributeurs (pharmacies, instituts de beauté et points de vente au détail) sur trois continents. Fort de 7 années de vécu entrepreneurial, Christian a accepté de partager avec nous le fruit de son expérience.

Ce texte a initialement été publié sur son profil Facebook. 

« Bientôt cinq ans que j’ai troqué mon costume de banquier d’affaires contre celui d’entrepreneur. L’occasion pour moi de rappeler quelques comportements qui aideront le chef d’entreprise tout au long de son parcours. De par ses nombreuses sollicitations, du niveau de ses responsabilités et de son engagement, l’entrepreneur passe par un nombre incalculable d’émotions. Comme des milliers d’autres, je suis passé par la peur, le doute, le ressentiment, la frustration, la colère, le choc, la tristesse, la vulnérabilité, l’empressement, le manque, la contrariété, l’incompréhension, le découragement, l’exaspération, l’épuisement, mais aussi la motivation, la fascination, la joie et l’espoir. Il existe tout de même un sentiment que je n’aurais sans doute jamais dans ma vie d’entrepreneur : l’ennuie. Si ce sentiment émerge, alors il est temps de s’attaquer à un tout nouveau challenge.

Toutes ces émotions sont autant d’énergies qu’il est nécessaire de canaliser afin d’atteindre ses objectifs. Un entrepreneur a une vision, il sait que le chemin sera long et tortueux. Un entrepreneur sait que mener à bien son projet est une course de fond pas un sprint. « Sprinter » revient à se précipiter, donc à se rendre plus vulnérable à l’un de ces sentiments, car pendant cette course ils deviennent beaucoup plus intenses, plus forts donc plus dangereux lorsque nous n’avons pas assez de recul. Pour mener à bien son projet j’ai identifié quatre comportements, quatre points cardinaux permettant à l’entrepreneur de garder le cap et d’atteindre ses objectifs. Je l’ai nommé « The Entrepreneurial PATH ». « PATH » est un terme en langue anglaise qui désigne «chemin », « sentier » ou bien « trajectoire ». Ce terme n’a pas été choisi par hasard. Les initiales désignent ces fameux points que l’entrepreneur doit suivre pour mener à bien sa barque. PATH correspond à la PATIENCE (Patience en anglais), l’AUDACE (Adventurousness), le TRAVAIL (Task) et l’HUMILITE (Humility). Cette théorie est accompagnée d’un schéma permettant aux futurs créateurs d’entreprises de mieux en apprécier sa validité.

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I. Patient

L’aventure entrepreneuriale est une course de fond, se précipiter n’est pas forcément la meilleure des stratégies.

Il est essentiel de considérer une entreprise nouvellement créée comme un nourrisson, un bébé qu’il faut couver, chérir, apprendre à parler, apprendre à marcher puis à courir. Imaginez l’apprentissage de la physique quantique à un nouveau-né. L’entrepreneur doit prendre conscience du fait qu’il existe des étapes à franchir. Cet enfant doit savoir s’exprimer, puis compter de 1 à 10, puis connaître ses tables de multiplication avant de résoudre des équations extrêmement complexes. L’apprentissage de l’entreprise se fait étapes par étapes et nécessite de l’endurance. Apprendre le b.a.-ba constitue la base d’un bon lancement. Que serait une entreprise sans les connaissances fondamentales sur : les spécificités de son secteur, les exigences de son environnement, les besoins de ses clients, la qualité de ses fournisseurs ?

La patience doit être intégrée dans l’esprit du fondateur. Je me permets de reprendre l’expression populaire « Rome ne s’est pas faite en un jour ». «Start Small » ne veut pas dire « Think Small ». L’entrepreneur doit être guidé par une vision forte, de long terme et doit ménager sa monture pour atteindre ses objectifs. Cette patience lui fera gagner en expérience, lui donnera l’occasion de se tromper, de recommencer et de se tromper de nouveau tout en solidifiant son niveau de confiance en l’avenir. C’est pourquoi, avec la hausse du niveau d’expérience, l’angle de la droite de la patience sur notre schéma pourrait devenir beaucoup plus obtus. Aller trop vite, nous prive d’une expérience précieuse.

Lorsque nous sommes « petits », nous voyons mieux les choses, nous sommes plus proches des réalités du terrain et collectons souvent des informations fondamentales pour le développement de notre activité.

II. Audacieux

Oui il en faut du courage pour se lancer mais également pour supporter les tempêtes rencontrées sur notre chemin. L’audace permet d’aller plus loin, dépasser ses frontières, dépasser ses limites et se découvrir des qualités insoupçonnées. Je pense réellement que le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt, mais surtout à ceux qui osent. Si tu ne quittes pas ta zone de confort, tu te priveras d’un flot d’opportunités. L’être humain aime la sécurité, le confort ou du moins l’idée qu’il se fait du confort, or une petite voix me souffle chaque jour un petit adage économique qui dit « pas de risque, pas de rendement. » ou une expression non moins populaire qui dit « qui ne tente rien, n’a rien. ». En effet, le risque est proportionnel au rendement et être patient ne suffit pas. L’entrepreneur doit apprendre à se libérer de ses chaînes, du dogme, des habitudes, de la « normalité » ou de ses certitudes.

C’est Clayton M. Christensen, Professeur d’Harvard, qui utilisa pour la première fois le terme d’innovation disruptive. Grâce à un modèle économique novateur, l’entrepreneur apportera un nouveau produit ou service transformant radicalement son marché. « Disrupter » c’est bouleverser son marché, mais pour le bouleverser l’audace est notre meilleur ami. C’est cette attitude qui fait la différence entre un innovateur et un suiveur. Mais l’audace c’est également savoir faire entendre sa voix. Un entrepreneur « entreprend » il n’attend pas. Il n’attend pas la bonne opportunité, il la débusque, il se renseigne, il se déplace, il collecte, il demande, il s’exprime, il fait connaître son produit ou son service. Soit tu gères une boutique, tu attends les clients ou bien tu prends ton téléphone, envoi des mails et te déplaces vers ces derniers. C’est cette audace qui rend ton produit ou service différent.

III. Travailleur

Beaucoup se disent très talentueux, ils possèdent un don, un talent naturel qui leur fera traverser des montagnes. Oui le talent existe et je suis persuadé que nous en possédons tous un. Il suffit de bien l’identifier et d’en libérer toutes les potentialités. Mais il faut savoir que «le travail bat le talent lorsque le talent ne travaille pas » (Tim Notke), c’est aussi vrai dans l’univers du sport que de l’entrepreneuriat. Certains évoquent la chance mais pour avoir de la chance il faut bien souvent la provoquer. Elles sont nombreuses, ces figures qui par leur abnégation ont su démontrer que le travail et la persévérance payaient : d’Oprah Winfrey (gourou des médias) à Jack Ma (fondateur d’Alibaba.com), d’Arnold schwarzenegger (acteur et homme politique) à Michael Jordan (l’un des plus grands joueurs de basketball de l’histoire).

Les exemples sont nombreux et tout prouve que si à un moment donné vous ne maîtrisez pas votre sujet, vous allez soit perdre en crédibilité, soit vous laisser bouffer par quelqu’un, qui sur votre marché maîtrise mieux votre sujet que vous.

Il est possible que vous soyez bon dans votre domaine, mais aujourd’hui, avec les nouveaux outils de communication, l’environnement évolue à toute vitesse et les connaissances doivent régulièrement être actualisées. Aujourd’hui, il est beaucoup plus facile de créer une société, plus facile de faire des photos, de les traiter, plus facile de se cultiver ou de s’informer. L’entreprise ne doit pas se reposer sur ses lauriers comme l’ont fait Kodak, Nokia ou Blackberry. La concurrence existe, les acteurs sont nombreux et coriaces.

L’entrepreneur doit pouvoir « disrupter » mais il doit aussi savoir « s’adapter ». C’est le travail qui permet d’accumuler des connaissances et d’améliorer son agilité face au marché. Et ces connaissances pratiques grandiront progressivement et enrichiront l’expérience. Il faut travailler, avoir cette soif d’apprendre et se frotter à l’environnement. Lorsque vous irez vous coucher, rappelez-vous, qu’un individu beaucoup plus jeune que vous, beaucoup plus enthousiaste que vous est en train de travailler beaucoup plus dur que vous afin de détrôner votre produit ou service. Le psychologue suédois, Anders Ericsson estimait que 10.000 heures de travail permettraient d’atteindre un niveau d’excellence dans une discipline et de faire de nous un expert. Je reprendrai avec délectation une expression camerounaise qui dit « tu dors, ta vie dort ».

IV. Humble

Il travaille dur, il est patient, il est audacieux mais il est arrogant et pense qu’il sait tout. Il semblerait que l’humilité reste la barrière protectrice qui permet à l’entrepreneur de maintenir le cap. Avoir de l’expérience, des capacités orales et interpersonnelles fortes ne fait pas de nous des surhommes, tout simplement parce que la connaissance (« knowledge ») est infinie. L’humilité nous protège. Elle nous permet de ne pas baisser la garde, nous pousse à écouter les autres, nous rappelle que d’autres ont tenté ou fait avant nous, nous permet de relativiser nos récents succès, nous pousse à nous questionner, nous protège de nos propres certitudes et nous rappelle surtout que le respect des aînés, la bienséance ou la courtoisie existent.

Même si nous souhaitons être moteur de changement, il est important de garder ses valeurs, se rappeler que les autres peuvent nous apporter beaucoup dans notre développement : notre famille, nos amis, des entrepreneurs avec plus d’expérience, nos employés, nos clients, nos anciens professeurs, nos associés et notre communauté. Notre audace et notre courage ne doivent jamais dépasser cette barrière qu’est l’humilité. L’humilité de reconnaître que nous ne nous sommes pas développés tout seul, l’humilité de reconnaître que notre expérience personnelle ne dépassera jamais la connaissance elle-même. Entrepreneurs, suivez votre PATH et devenez de futurs leaders. »

 

Christian NGAN, CEO of Madlyn Cazalis Group,

The Entrepreneurial PATH, 2016


Le coin des experts est une rubrique du blog du disrupteur. Elle accueille les contributions de personnes ayant une certaine expérience en entrepreneuriat, en communication, en marketing ou dans n’importe quel autre domaine connexe. Le but de cet espace est de permettre au public cible de profiter de l’expérience des professionnels des différents secteurs d’intérêt. 

About Ace (70 Articles)
Ace est un passionné de communication et de startups. Autodidacte formé auprès de professionnels du marketing et de la communication, il allie exploration personnelle, pratique du métier et recherche incessante d'amélioration dans une approche intégrative, qui s'intéresse au secteur de façon globale, en le replaçant au centre de l'entreprise. Sa démarche s'attache à formaliser de manière spécifique les problématiques communicationnelles qui touchent les structures en tenant compte de leurs divers niveaux d'organisation.

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